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Sur scène

Ça y est, j’ai lu dix pages de En attendant Godot. Au milieu. Un jour, certainement, je compléterai avec toutes les pages d’avant et toutes celles d’après. Ma fille devait mettre en scène et jouer ce passage avec deux camarades. J’étais chargée de le lui faire réciter. Elle était Estragon, moi Vladimir (voix grave) et le garçon (voix aigüe). Les décors furent réalisés en une après-midi de bricolage. Notre grande girafe en raphia de Madagascar fut détrônée de sa place à côté de la télévision et emballée de papier kraft noir et de scotch. À la place de ses deux mignonnes petites cornes, trois longues branches pendaient. Ce spectre végétal était éclairé par une lune en Sagex grêlé contenant un phare à vélo. Leur adaptation fut un succès, je crois. Ensuite les éléments du décor restèrent quelque temps à l’école. Une fois le phare à vélo éteint, la lune ne fut plus considérée comme un objet de culture et probablement jetée. Ma fille a ramené l’arbre et l’a posé tel quel dans notre séjour. Par principe éducatif, son père et moi avons attendu qu’elle consente à déshabiller notre girafe de ses attributs littéraires pour la rendre à sa fonction première de symbole de notre passé aventurier. Un passé avant l’arrivée des enfants, fait de voyages à deux, de baobabs souriants et de marchés colorés. La demande nous semblait raisonnable, notre point de vue inattaquable. Pour notre fille cependant, l’arbre représentait tout autre chose, ses débuts sur les planches, un haut fait de bricolage, le décodage laborieux d’une pièce maîtresse de la littérature. En comparaison, notre girafe ne faisait pas le poids.